Krystyna Żywulska naquit à Łódź en 1914 sous le nom de Sonia Landau. Elle étudia le droit à l’Université de Varsovie, ses études furent interrompues par la Seconde Guerre mondiale. En 1941, elle fit transférée avec sa famille dans le ghetto de Varsovie. Au bout de deux ans, elle s’en échappa avec sa mère (abandonnant son père dans des circonstances dramatiques dans le ghetto). Par la suite, elle s’engagea dans la résistance polonaise sous le nom de Zofia Wiśniewska où elle travailla dans une section qui produisait de faux documents. En 1943, elle fut arrêtée par la Gestapo. Lors de son interrogatoire dans les locaux de la Gestapo dans l’avenue Szucha, elle prétendit s’appeler Krystyna Żywulska. Emprisonnée à la prison de Pawiak, puis ayant été reconnue prisonnière politique, elle fut envoyée à Auschwitz. Żywulska fut l’une des sept survivantes d’un transport qui comptait près de 800 personnes de la prison de Pawiak vers les camps. Au camp d’Auschwitz, elle travailla dans une unité pour femmes qui enregistraient les nouveaux détenus (« le Canada »). Elle y écrivit également des poèmes (alors que cette activité demeurait interdite), ce qui eut une grande importance aux yeux de ses codétenues qui apprenaient ses œuvres par cœur et les transmettaient à d’autres détenues. Son poème le plus célèbre, « Przemarsz przez bramę » (« Marche par la porte »), aurait été chanté le jour de la libération du camp. D’autres – intitulés « Appel », « Tańcz, dziewczyno », « Niewysłany list », « Wycieczka w nieznane », « Parada » ou « Wcześniej rosły tu brzozy » – furent également secrètement transmis à d’autres prisonniers qui les préservèrent dans leur mémoire. La plupart de ces poèmes disparurent, seuls huit survécurent jusqu’à nos jours, parmi eux quatre que Żywulska a inclus par la suite dans son livre J’ai survécu à Auschwitz. Inspirée par ces poèmes édifiants, une codétenue sauva la vie de Żywulska quand celle-ci souffrait du typhus en réussissant à la faire muter à des tâches plus légères dans le Effektenkammer, unité qui rassemblait les affaires confisquées aux nouveaux prisonniers. Żywulska remplissait ces tâches à Birkenau, à proximité immédiate des chambres à gaz. C’est de cette période que date les paroles du chant « Wiązanka z Effektenkammer » (« Le bouquet de Effektenkammer ») dont Żywulska est l’auteure.
Le 18 janvier 1945, lors de « la marche de la mort », c’est-à-dire de l’évacuation du camp de concentration d’Auschwitz vers Wodzisław Śląski, Żywulska réussit à s’échapper à la frontière entre Brzeszcze et Jawiszowice, après quoi elle fut cachée par certains membres de la communauté locale. Dorénavant, elle commença à fêter son anniversaire le 18 janvier de chaque année. Le nom Żywulska (le mot polonais “żywa” signifie “la vivante”) qu’elle finit par adopter officiellement, affirmait sa grande volonté de vie.
Très vite, alors que ces souvenirs demeuraient encore vivaces, elle entama à décrire son expérience des camps de la mort, ceux-ci furent publiées en 1946 et ils constituaient les premiers récits d’Auschwitz-Birkenau. Przeżyłam Oświęcim fut progressivement publié en anglais (I survived Auschwitz), français (J’ai survécu à Auschwitz), allemand (Ich überlebte Auschwitz), russe (Я пережила Освенцим) et tchèque (Přežila jsem Osvětim).
De retour à Varsovie, elle épousa un ami d’enfance, Leon Andrzejewski (1910-1978), officier des services de sécurité de la République populaire de Pologne. En 1950, elle rejoignit le Parti uni des travailleurs polonais (PZPR) et devint membre du Comité exécutif de ce parti (POP PZPR) rattaché au Bureau principal du syndicat des écrivains polonais. Ce fut dans de telles circonstances que Żywulska réussit à se sentir en sécurité, tout en affirmant sa conviction qu’elle méritait tout simplement une vie meilleure et plus paisible après ce qu’elle avait vécu. Ce n’est que des années plus tard qu’elle s’est rendu compte que son approche n’était pas tout à fait adéquate.
Neanmoins, elle continua en ce temps à profiter de la vie et à partager sa joie de vivre avec son entourage. Elle écrivit des chroniques, des satires, des épigrammes et d’autres poèmes humoristiques. Ses monologues et chansons de cabaret furent aussi bien interprétés à la radio ou au cinéma que publiés dans la presse écrite. En 1968, la chanteuse polonaise Sława Przybylska a interprété sa chanson « Żyje się raz » (« On ne vit qu’une fois »). Żywulska demeure une auteure célèbre de paroles pour les cabarets Wagabund et U Lopka et de chansons dont les plus populaires sont : « Dopóki życie trwa » (« Tant que la vie dure »), « Taka jestem zakochana » (« Je suis si amoureux »), « Tańcz ze mną, tańcz » (« Danse avec moi ») du le film « Kochajmy syrenki » (1966) et « Ty i ja, i noc » (« Toi et moi, et la nuit ») du le film « Kulig » (1968).
A la fin des années 1950, Żywulska rencontra à Varsovie Thomas Harlan, dont le père, Veit Harlan, réalisait des films de propagande sous le régime national socialiste. Thomas Harlan traquait les crimes nazis commis par des personnes qui à l’époque étaient des figures importantes en République fédérale d’Allemagne. Elle l’aida dans ses recherches dont la publication était mal vue en Allemagne, celle-ci permirent finalement à traduire en justice dans les années 1960 plusieurs anciens criminels nazis. Quand Harlan et Żywulska commencèrent à découvrir qu’en République démocratique allemande d’anciens nazis faisaient également carrière, les commanditaire du livre dans lequel leurs recherches devaient être publiées ont décidé de suspendre le projet. La liaison de Harlan et Żywulska, d’un fils de nazi et d’une juive rescapée d’Auschwitz, a été décrite en 1998 par Liane Dirks dans son livre « Krystyna ».
En 1963, Żywulska présenta dans son deuxième livre, Pusta woda (L’eau vide), ses expériences du ghetto de Varsovie, le livre fit traduit d’abord en anglais (Empty Water), puis en allemand (Leeres Wasser) et enfin en japonais (空の水). En décrivant les Polonais, les Juifs et les Allemands, elle sut éviter les généralisations simplistes et traiter chaque cas à part.
Suite à la campagne antisémite qui éclata en Pologne en mars 1968, Żywulska, qui ne révéla son origine juive que dans son ouvrage Pusta woda (L’ eau vide), fut victime d’ostracisme et ses deux fils, quant à eux, durent quitter le pays. Tout comme ces derniers, elle se rendit d’abord à Munich, puis à Düsseldorf, ville où elle s’établit définitivement. Elle y traduisit en allemand ses deux autobiographies. À la fin de sa vie, elle commença également à peindre. En 1992, elle décéda suite à une leucémie. Elle est enterrée au cimetière de Düsseldorf.
En 1991, Maria Nurowska, inspirée par ses anciens entretiens avec Żywulska, a décrit dans son livre Listy miłości (Un amour de Varsovie) l’un des motifs contenu dans la biographie de cette dernière datant du temps de son emprisonnement au camp de concentration.
Plus tard, en 1998, Liane Dirks a utilisé les informations contenus dans le journal de Żywulska et les notes recueillies à la suites de ses conversations avec celle-ci pour écrire son livre Krystyna. Néanmoins, selon Andrzej Szczypiorski, cette œuvre stylisée qui rappelle, d’une part, à un documentaire et, d’autre part, à un texte littéraire, ne permet de découvrir la véritable vie de Żywulska que fort partiellement.
En 2012, Jake Heggie a composé un court opéra intitulé Another Sunrise ; dans cette œuvre il présente sa protagoniste (Żywulska) qui tente chaque nuit de trouver un langage approprié pour exprimer ses souvenirs qu’elle souhaite enregistrer sur cassette.
Par ailleurs, des travaux sur un long métrage s’inspirant du livre Pusta Woda (L’eau vide) ont débutés en 2012.
En 2016, le théâtre NITI de Saint-Pétersbourg a produit un spectacle musical inspiré de l’oeuvre de Żywulska, J’ai survécu à Auschwitz. Celui-ci raconte l’histoire de six jeunes femmes dont les destinées se sont croisées dans les camps de la mort et dépeint à la fois leur courage, leur lutte, leur amour et leur foi. Il présente également l’histoire d’une femme dont la volonté inébranlable et le désir absolu de vivre l’ont aidée à survivre et à remporter une victoire sur ce qui pouvait sembler impossible à surmonter.
La même année, Jake Heggie a créé un opéra intitulé Out of Darkness : two remain, inspiré de Another Sunrise (Un autre levé de soleil) qui a reçu de nombreux prix et a été présenté dans les opéras de San Francisco, de Seattle, de Chicago, d’Atlanta, de Toronto, de Baltimore, d’Amsterdam et dans bien d’autres.
En outre, des travaux de production autour du film Trzy kobiety (Trois femmes) dont la réalisatrice est Magdalena Łazarkiewicz ont débuté en 2017. Ce film se veut raconter l’histoire de la rencontre de Krystyna Żywulska, de Stanisława Rachwał, une prisonnière rescapée d’un camp allemand et persécutée après la guerre par le Bureau de sécurité ainsi que de Maria Mandel, sa persécutrice du camp nazi. Le producteur du film, Andrzej Stachecki, a annoncé : « En s’appuyant sur ces histoires nous avons voulu créer une espèce de synthèse qui montrerait comment un être humain, confronté à divers totalitarismes, arrive à retrouver sa dignité dans des situations extrêmes et – surtout – à pardonner ».